GastORnomie | à propos | Saint Nectaire fermier, le meilleur fromage du monde
A la plage, je lis “Les accords mets-vin - Un art français” et je me régale. En hors-d’œuvre, l’introduction, signée Jean-Robert Pitte qui dirige cet ouvrage, est passionnante. On y apprend que les Gaulois et les Romains avaient un point commun, les premiers adorent “les banquets au cours desquels ils mangent beaucoup en buvant de la cervoise, de l’hydromel ou, pour les plus fortunés, du vin”. Quant aux Romains, “ils aiment jusqu’à l’excès le vin que les marchands leur apportent sans mélange, ils en boivent si avidement que, devenu ivres, ils tombent dans un profond sommeil ou dans des transports furieux”.
J’ai particulièrement aimé le rapprochement entre l’art contemporain et la cuisine du même type, avec cette citation de Marguerite Duras, “Il y aurait une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture des mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Egarés. Là, écrits. Et quitté aussitôt.” suivie de cette conclusion de Jean-Robert Pitte, Appliqués à la cuisine, ces ingrédients que rien ne lie entre eux, ni une cuisson commune, ni une sauce et surtout pas une recherche symphonique.
J’aime bien aussi ce qu’écrit Christophe Lavelle, et comment il l’écrit, dans son article Association mets-vin : la science des accords… et désaccords.”. Pédagogue et clair, grâce à lui, j’ai finalement compris des choses que je ressentais sans savoir comment les expliquer. Par exemple sur le thème de l’association vin rouge et poisson/fruit de mer il écrit "La perception d’un goût métallique indésirable lorsqu’on boit un rouge sur des fruits de mer, serait attribuée à la présence de fer dans le vin". Il explique aussi que "l’arrière-goût, tout aussi indésirable, ressenti lors de la consommation simultanée de vin et de calamar viendrait de la présence de dioxyde de soufre présent dans le vin qui dégraderait certaines chaînes d’acides gras insaturés présents dans le teuthide goûteux." C’est sans doute pour ça que je préfère un vin blanc avec des huîtres… Même si je suis tenté de faire un essai avec de la bière artisanale.
Je finis avec l’article de Jacky Rigaux tout aussi passionnant, Le gourmet, inspirateur du chef de cuisine et du gastronome, où j’ai appris qu’à cause de la révolution de 1789, on détruisit les vignes qui produisaient un vin fin, car elles appartenaient au clergé (je simplifie), pour les remplacer par des plans beaucoup productifs qui donnaient un vin commun, l’ancêtre du Kiravi?. Au passage le clos-saint-jacques de Gevrey-Chambertin y passa ainsi que les vignes de l’Orléanais. Il cite aussi Jacques Puisais, fondateur de l’Institut Français du Goût:
Le vin doit avoir la gueule de l’endroit et les tripes de l’homme… Au fond du verre, je veux retrouver le paysage du lieu où je suis.
En cadeaux je vous mets la quatrième de couverture
Grenouilles au riesling, fromage et malaga... Marier les vins et les mets est depuis deux siècles l'âme même du « Repas gastronomique des Français » inscrit par l'UNESCO en 2010 sur la liste du patrimoine immatériel de l'humanité.
On boit du vin en Gaule depuis l'Antiquité, mais le verre de vin n'y a pas toujours eu sa place à table. Loin d'être un élan hasardeux ou impulsif, accorder le boire au manger est un art subtil qui naît progressivement en France entre le XVIIIe et le XIXe siècle, dans le milieu de Cour, puis dans les restaurants de Paris. Le passage du service « à la française » au service « à la russe » le permet.
Cet ouvrage nous plonge dans l'histoire mondiale de ces alliances mets-vins - où la France tient une place de choix -, depuis les Pharaons jusqu'à la « bistronomie » moderne, en passant par la Physiologie du goût de Brillat-Savarin et les rituels chinois ou américains.
Les auteurs (historiens, géographes, conservateurs de musée, écrivains, professionnels de la gastronomie et du vin, gastronomes) nous précisent les évolutions et les ruptures de cet art. Ils nous plongent dans cette symphonie captivante, rythmée par les innovations et les inventions parfois radicales dans la sphère culinaire, dont certaines au détriment de la recherche de l'harmonie avec les vins.
Un savoureux mélange de sources, d'analyses et d'essais pour comprendre la genèse et les évolutions d'un art en plein développement.
Par respect pour le texte originel de Christophe Lavelle, je me dois de vous signaler, que je n'ai pas pu m'empêcher d'ajouter l'expression "teuthide goûteux" même si elle est lourde et que sa version était bien plus légère. Mais je trouve que "teuthide goûteux" décrit bien la bête quand on la voit se déplacer dans la Méditerranée. (Même chose avec je me régale, en hors-d’œuvre, 26 articles à dévorer! Je sais, c'est pas bien, mais c'est plus fort que moi)
Les accords mets-vin - Un art français, 422 pages, 26 articles à dévorer!